Dans nos accueils et nos visites, privilégier le temps de la rencontre
Monsieur Vincent a imaginé un va-et-vient incessant entre deux pôles complémentaires : le corporel et le spirituel ; il sait bien qu’il s’agit d’abord de soigner le corps, de le nourrir, de visiter le malade et de passer du temps auprès de lui. Mais, en même temps, il croit aussi à la nécessité d’un redressement spirituel. Ainsi, bien avant l’encyclique de saint Paul VI, Vincent veut promouvoir tout l’Homme et tout homme.

Comme depuis toujours
Fêtant les 190 ans de notre chère Société, nous disions que tout est parti de la rencontre entre sœur Rosalie Rendu et le jeune Frédéric Ozanam. Celui-ci a découvert que des êtres humains, en pleine ville à Paris, mouraient de faim. Vincent avait fait le même constat bien avant. Il est l’homme des pauvres, c’est son « fardeau. » Il dira un jour : « Les pauvres qui ne savent où aller, ni que faire, qui souffrent déjà et qui se multiplient tous les jours, c’est mon poids et ma douleur. » (Vie de saint Vincent de Paul, P. Collet, p. 499). Quand nous regardons notre société en 2023, les paroles de Vincent sont très actuelles ! Plus nous avançons, plus nos centres d’accueil ont du mal à faire face devant les queues alimentaires : les médias, au début de l’année scolaire, ont largement fait des commentaires ! Monsieur Vincent savait la maxime : « ventre affamé n’a pas d’oreille ». D’où l’aide alimentaire. Mais, en servant les pauvres, les personnes en situation de précarité, nous sommes invités à promouvoir tout l’Homme.
Au service de la faim spirituelle
La belle prière inspirée par le regretté père Jean-Pierre Renouard nous fait dire : « Obtiens-nous un cœur tendre et compatissant aux misères et aux souffrances des autres… » À la suite de saint Vincent, Frédéric Ozanam a découvert la « plus grande misère : ne pas connaître Dieu ». D’où le fond même de la spiritualité vincentienne : aimer, servir affectivement et effectivement. Car, à côté de la faim du corps, il y a la faim de l’esprit. Recevant dans nos accueils des personnes en situation de précarité, nous avons à être attentifs à la personne tout entière. Elle n’est pas simplement un corps, un ventre qui a faim, mais un fils ou une fille de Dieu. Comme l’a souligné le père Bernard Koch, éminent spécialiste de la vie et du message de Monsieur Vincent : « saint Vincent ajoute au service des pauvres la dimension du service de Jésus. » Cette symbiose est au cœur de la spiritualité vincentienne. L’accompagnement avec l’aide alimentaire doit tendre à cette dimension.
Dieu veut se servir de nous
Accueillir. Oui, mais hélas ! Pour diverses raisons et en particulier du manque de temps, la distribution alimentaire se déroule parfois en vitesse et cela n’est pas bon. De plus en plus, dans nos locaux, à côté de la salle où l’on sert les victuailles, il y a un endroit où l’on peut vraiment accueillir une personne et dialoguer avec elle. Ce moment-là est fondamental. Mais n’oublions pas notre spécificité : la rencontre à domicile ! Cela est la véritable origine de notre Société : la mise en place de « la charité de proximité ». Ce que fait l’équipe de Limoges (Haute-Vienne) en portant les colis à domicile. En fin d’année, voici une nouvelle fois Noël : « Dieu parmi nous » se rappelle à nous. Et si notre aide alimentaire, si nos visites à domicile se vivaient en lien avec l’Incarnation de Jésus-Christ ? Car l’Homme ne vit pas seulement de pain !
Méditons ces mots de Monsieur Vincent : « c’est là votre capital de faire connaître Dieu par le service spirituel que vous devez aux pauvres, en les servant corporellement… Il faut leur parler avec tant de charité et d’amabilité qu’ils voient que seul l’intérêt de la gloire de Dieu et de leur salut vous porte. »
Jean-Claude Peteytas,
diacre vincentien
À côté de la faim du corps, il y a la faim de l'esprit.
