Patrick, le bon larron témoin de la miséricorde

Sur scène, Patrick était Dismas, le bon larron. Celui qui reconnaît le Christ crucifié à ses côtés, comme Sauveur et premier entré au Paradis. À Lourdes (65), dans le chœur de l’église Sainte-Bernadette, l’estrade carrelée faisait office de Golgotha tandis que Jésus, juché sur une chaise en plastique, était entouré des deux larrons. Patrick, 62 ans, T-shirt noir de rocker, barbe et cheveux longs, incarnait totalement son personnage de pécheur repenti. « Il s’est retrouvé dans l’histoire du bon larron. On a pensé à lui tout de suite pour ce rôle », raconte Aude Siméon, autrice de la pièce, Coup de tonnerre au Paradis, et bénévole de la Fraternité du Bon Larron. Un spectacle présenté lors des Rencontres Nationales de la Société de Saint-Vincent-de-Paul (lire Ozanam Magazine 259 et ici sur ssvp.fr). Ensemble, d’anciens détenus et des bénévoles de cette association ont joué devant 1 700 spectateurs.
Rencontrer Dieu en prison
Sortant de scène, le bon larron raconte sans peine son histoire. Patrick a le tutoiement fixant son interlocuteur dans les yeux, il témoigne de sa vie cabossée. Une dizaine d’années à l’ombre et à sa sortie de prison : « rien ou presque ! Ni logement ou adresse. Sans la Fraternité, je retournais au placard, la double peine pour moi ! » L’association l’accompagne quelques mois à Lisieux (76), puis il arrive à Auffargis (78), siège de la Fraternité pour un temps de colocation avec trois anciens détenus. Peu à peu, accompagné par les bénévoles, il se réinsère, trouve un travail et un logement. Aujourd’hui complètement libre, il n’a pas oublié l’aide reçue et le sort de ceux qui sortent de prison.
Le cuistot, aujourd’hui retraité, continue de fréquenter la Fraternité. « J’ai fait une partie de Compostelle avec les bénévoles. À Auffargis, je jardine. Le vendredi je prépare le déjeuner et je participe au groupe d’Évangile. » Car, en prison, Patrick a rencontré Dieu. Depuis, il témoigne avec ses mots, de la foi qui l’anime. Devant des paroissiens, d’anciens détenus, des bénévoles de l’association ou même les journalistes, Patrick partage son parcours de vie et de croyant. « Il y a deux choses qu’on cultive en prison : la haine ou l’amour. Au départ, Dieu te donne un cœur plein. Si le tien est vide, c’est que tu n’as pas su t’en servir ! » Le cœur de Patrick est loin d’être vide. Il voudrait que le grand public partage cette miséricorde infinie du Seigneur envers « ses frères et sœurs enfermés ». Un témoignage puissant et nécessaire selon Aude Siméon : « C’est fondamental que ce soit lui et les anciens détenus qui parlent. Nous, les bénévoles, n’avons pas leur vécu, en prison. »
Un regard de miséricorde
S’il n’a pas connu le père Aubry, fondateur de la Fraternité (lire encadré), Patrick a fait tatouer sa prière sur son bras (« Toi qui as assuré une entrée immédiate dans le ciel à un bandit (…) fais tomber sur moi ce même regard de miséricorde »). Sur l’autre bras : Jésus. Car, il en est certain, le Christ l’accompagne. À Lourdes, il n’a pas eu peur de jouer au théâtre, lui qui n’est pas comédien. Il montre le ciel avec son doigt : « Il était là. » Patrick, le bon larron, livre le secret de l’amour de Dieu : « C’est très beau, quand tu t’aperçois que Jésus est dans ta vie. Tu peux être dans la pire des épreuves, Il ne te lâchera pas. Tout le monde peut te laisser, la famille, les amis… Jésus, jusqu’au dernier souffle, Il est à côté de toi et il te dit « je suis là mec, je ne t’abandonne pas ». »

EN SAVOIR +
En 1981, le père Yves Aubry (1921–2002), aumônier de la prison de Bois-d’Arcy (78), fonde la Fraternité des prisons du Bon Larron. Depuis, cette Association spécialisée, membre du réseau de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, poursuit son action auprès des détenus et des personnes sortant de prison. En plus d’une colocation à Auffargis, la Fraternité pilote aussi un réseau de correspondance entre détenus et volontaires bénévoles partout en France. Animés par une profonde spiritualité mais ouverts à tous, les membres organisent également des rencontres pour partager, avec le grand public, le témoignage des anciens détenus.
Plus d’infos sur https://bonlarron.org
1 700 personnes à Lourdes
En octobre 2024, la Société de Saint-Vincent-de-Paul a rassemblé des bénévoles et des personnes accompagnées pour une Rencontre nationale sur le thème « Révélons nos talents ». Plusieurs équipes sont montées sur scène pour présenter des créations artistiques variées et partager de vrais moments de fraternité.
Retrouvez le récit de ces journées ici et la captation du spectacle sur le bon larron dans la vidéo ci-dessous.