Vivre le Carême 2025
Lourdes 2024 Jour #4 Chanter et jouer pour (se) révéler
Samedi 12 octobre, pour l’avant-dernier jour des Rencontres Nationales, plusieurs groupes ont présenté leurs projets créatifs. Du théâtre ou du chant pour (se) révéler et faire fructifier ses talents. Par vam. Photos Cat Pham et vam.
La promesse du Vincentien
Pour la messe du matin, les participants aux Rencontres Nationales de la Société de Saint-Vincent-de-Paul arrivent par petits groupes à l’église Sainte-Bernadette. Samedi 12 octobre, troisième jour de rassemblement, ils ont pris leurs habitudes, chacun trouve son banc, une place presque attitrée, à côté des membres de son groupe régional ou d’autres. On se salue, on se fait un petit signe et on sort le petit carnet pour suivre le programme. Les chants de louange commencent à être bien connus. Même les plus timides se lancent et lèvent les mains pour manifester leur joie.
Avant le chant d’envoi, il est temps de renouveler une promesse : celle du Vincentien*. « (…) Je promets de placer l’amour et la charité comme règles fondamentales de ma vie (…) » D’une seule voix, les bénévoles s’engagent à suivre la voie de leur fondateur, Frédéric Ozanam et son inspirateur, saint Vincent.
*surnom donné aux bénévoles de la Société de Saint-Vincent-de-Paul
Sur la scène, les talents se révèlent
En quelques minutes, l’autel et l’ambon de l’église laissent place à une table familiale de salle à manger. Changement de décor sur le podium carrelé de l’église Sainte-Bernadette. La troupe qui entre en scène est intergénérationnelle, de 3 à 87 ans. « On s’appelle des voisins », raconte Sophie Blandin, chargée de présenter le projet d’habitat partagé qu’elle a lancé avec son mari Stanislas il y a 5 ans après un passage à… Lourdes. Ce matin, c’est un retour aux sources pour le couple qui joue dans une ambiance joyeuse et une belle fraternité, cette pièce de théâtre écrite spécialement avec les habitants de la maison. Filant la métaphore de l’église, les comédiens racontent la beauté de l’habitat partagé.
Le temps de changer de décor, Geneviève, de Charlieu (Loire), présente un court-métrage sur son équipe. « Le semeur est sorti pour semer », c’est en s’inspirant de cette parole de la Bible que le réalisateur a choisi de mettre en avant les actions des bénévoles. Ensemble, ils agissent, semant des petites graines de fraternité pour rendre la société plus bienveillante.
Et puis la troupe suivante s’installe. Les spectateurs sont transportés dans un tribunal. C’est une histoire de procès, et le choix de la pièce n’a rien d’anodin. On va juger Dismas, l’un des deux larrons crucifiés aux côtés du Christ. Sur scène ce matin, Dismas, c’est Patrick, 62 ans, un ancien détenu et membre de la Fraternité du Bon Larron. La structure (liée à la Société de Saint-Vincent-de-Paul) accompagne les personnes à leur sortie de prison pour faciliter la réinsertion. « Aujourd’hui, je vis ma vie, j’ai une compagne mais je continue de venir à la Fraternité, je rends des services. Je fais partie de la famille. » Pour la première fois de sa vie, Patrick a fait du théâtre. Quatre répétitions et le voilà, juché sur une chaise, les bras en croix, peinant sous la souffrance et prenant la défense Jésus. A sa sortie de scène on lui pose la question : a-t-il eu le trac ? Il sourit et désigne le ciel du doigt « Si ! Mais l’Esprit-Saint était là pour me faire dire mon texte au moment précis ! » Quelques minutes plus tôt, Jésus – enfin l’acteur incarnant le Christ – le regardait avec tendresse : « En vérité, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le Paradis. » (Lc 23, 39–43) Patrick-Dismas aimerait que le public pose sur les anciens détenus d’aujourd’hui, le même regard que Jésus il y a 2000 ans sur ce bon larron. « Avant tout, ce sont des hommes qui veulent juste se reconstruire. »
Troisième montée en scène. Le public ne faiblit pas et encourage le groupe qui s’installe. Le micro fait encore des siennes. « Ave, ave, ave… » entonne les spectateurs pour patienter tandis qu’on règle le piano électrique. Et puis ça y est, le groupe du Café Musique de Créteil se lance. Juste avant le déjeuner c’est musiques du monde. Sous la direction de Sandrine, le chœur chante donc, mais seulement avec la voix. C’est tout le corps qui parle : battements de main, claquements de doigts. Pour finir, Sandrine propose un chant haïtien. En quelques minutes elle donne les consignes à la salle : les mains devant, on agite les doigts. Studieux, le public écoute et répète. « Manimani… » Sandrine retourne au piano « Maintenant, chacun chante comme il peut ! » Chacun s’applique et c’est parti ! Les spectateurs se sont peut-être découverts capable de chanter en chœur. « Je suis ravie d’avoir chanté avec le public » s’exclame Emanuela, membre du Café Musique. Ravie aussi d’avoir montré cette initiative, un peu différente de l’aide alimentaire ou la visite à domicile, nécessaires bien sûr, mais « chanter, cela donne de la joie aux gens ! » A ses cotés Sabine, toute aussi émue, confie « ce qui est vrai, c’est que les talents se manifestent quand on les pratique ! Tu vois, on a parfois en nous des talents qu’on ignore. Mais on a des occasions et ça se développe et alors on comprend que oui, on a des talents ! »
Visiter, photographier, magasiner…
A Lourdes, certains passages sont presque obligatoires. La Grotte bien sur. Et puis la visite dans la ville : le cachot, le château… Difficile aussi de résister devant les étals des boutiques de souvenirs qui proposent divers articles forts utiles au pèlerin. Parapluie, chapeau de pluie, cape, lainage des Pyrénées, bérets, produits régionaux et vin local… A Lourdes, évidemment, l’article incontournable c’est la bouteille destinée à recueillir l’eau de la source. Petite, grande, en bidon, en forme de vierge en plastique… toutes les tailles s’entassent dans les corbeilles des devantures. Entre deux activités, les participants aux Rencontres prennent le temps de passer dans les boutiques. Une séance de magasinage* pour faire le plein de chapelets, médailles ou même de petites (et grandes) statues de la vierge. « Attends, je l’appelle pour savoir quel modèle elle préfère. » Au retour, les présents soigneusement choisis orneront les coins prières des maisons amies, souvenirs précieux d’un passage dans la cité mariale.
*shopping ou faire les magasins en québécois
Dans le groupe WhatsApp des jeunes, il était question d’une photo de groupe. Une autre, en plus de la très grande générale. Leur photo, spéciale, pour se souvenir aussi, de cette belle rencontre. Le rendez-vous ? A la Vierge couronnée forcément. Un point de ralliement central et simple à trouver. Un, deux, trois… Souriez ! Partagez !

A Lourdes, le docteur ne soigne pas
Début d’après-midi, rendez-vous historique. Le docteur Alessandro de Francisci, directeur du Bureau des constatations médicales de Lourdes donne une conférence sur son illustre prédécesseur : le Dr Dunot. Membre de la Société de Saint-Vincent-de-Paul (il ouvre d’ailleurs une Conférence), est le fondateur du Bureau. Décédé en 1891, il est enterré dans le cimetière de la ville.
Aujourd’hui, le Dr de Francisci est le 15e occupant des lieux. « Je suis un médecin inutile, raconte-t-il à une assemblée captivée. D’ordinaire, on va voir le médecin pour demander un conseil, une aide. Moi, on vient me voir pour me dire qu’on est guéri ! » A travers son intervention auprès des participants aux Rencontres Nationales de la Société de Saint-Vincent-de-Paul, le Dr de Francisci évoque son attachement personnel à la famille vincentienne*. Et demande au président national, Serge Castillon, un coup de pouce pour faire ériger un monument près du Bureau des constatations médicales, histoire que la mémoire de ce Vincentien historique soit honorée comme il se doit. A ses côtés, le père Andrea Brustolon, auteur de la biographie sur le Dr Dunot a répondu aux questions des participants.
*Ensemble des mouvements, associations et congrégations inspirées par l’œuvre de saint Vincent de Paul, dont fait partie la Société de Saint-Vincent-de-Paul.
Une soirée pour révéler ses talents
Le programme annonçait « table ronde ». En réalité, il n’y avait pas de table. Surtout, la rencontre n’avait rien à voir avec les échanges policés et un peu distanciés des rassemblements de mouvements ou associations. Ce samedi soir, six personnes accompagnées par des équipes locales de la Société de Saint-Vincent-de-Paul échangent avec amitié et simplicité sous la conduite bienveillante de Bérengère et Didier Decaudin, animateur de la Commission spirituelle. Peu à peu, chacun révèle au public son talent. C’est Patrick, d’Auxerre, qui raconte comment il a peint un tableau inspiré d’un séjour à Lourdes. Domino, elle, rêve d’être comédienne. Alors, ce soir, elle se lève et entonne pour l’assistance, une chanson de sa région. « Je la connais depuis que je suis petite. Je la chante même en faisant le ménage. » Annie aussi, elle aime chanter. « Mais je suis timide. » Un peu cachée sous son chapeau noir, elle n’ose pas. Accompagnée par Didier, elle finit par se lancer sur du Johnny. Encouragements du public qui chante le refrain de Gabrielle avec elle.
Puis vient le tour de Fatouma, qui vient de confier qu’elle fait du théâtre, à Limoges. Pourrait-elle interpréter un extrait? Elle bondit sur ses pieds, évidemment qu’elle jouer ! Même si « c’est dommage, je n’ai pas mes accessoires ! » Ce soir, Fatouma fait le show et emmène le public médusé avec elle dans les rayons d’un supermarché. Hilares, les spectateurs s’amusent tandis qu’en régie, on a du mal à faire suivre la lumière sur la comédienne qui bondit sur les marches, file dans le public avant de remonter sur scène. Fin de l’acte, ovation pour Fatouma qui confie qu’elle aime beaucoup… danser ! Si on avait le temps, elle ferait bien la démonstration de son talent…
Ensemble, partager ses talents !
Voilà, c’est fini… Le moment de conclure. « Alors, on les a faites ces Rencontres Nationales ! » s’enthousiasme Serge Castillon. Le président national de la Société de Saint-Vincent-de-Paul remonte le fil des ces trois journées riches de rencontres fraternelles, d’émotion et de créativité partagée. « Tous ces artistes, personnes rencontrées et bénévoles, nous ont fait entrer dans leur univers pour nous montrer comment voir le monde avec fraternité, comment voir le beau là où on ne le soupçonne pas. » Ensemble ils ont osé « faire, partager, avoir confiance dans l’autre, c’est ce que le Christ attend de nous. »
Serge Castillon insiste aussi sur la vitalité du réseau, révélée par la réussite de ces Rencontres Nationales. « Elles montrent que Chemin du Renouveau est en route. En rentrant chez vous, en métropole et en outremer, avec Marie dans votre cœur, portez chez vous le Chemin du Renouveau de la Société de Saint-Vincent-de-Paul ! »
Dimanche matin, après l’ultime messe concluant ces Rencontres, chacun aura sans doute en tête les mots de Franck, l’un des acteurs de la troupe Spectaculaires de Sisteron. « Je repars avec quelque chose de Lourdes dans le coeur, j’espère que ça va rester le plus longtemps possible ! »
Le vlog d’Agathe Rodrigues